« La cité scientifique de Doubna. De la « ville idéale » soviétique à la vitrine du renouveau de la Russie contemporaine, étude d’un territoire d’innovation mis au service d’un discours de puissance » par Kévin Limonier
Kévin Limonier soutiendra sa thèse le vendredi 28 novembre 2014 à 14h00 à l’université Paris 8 dans la salle D143 devant un jury composé de :
Mme Béatrice Giblin Professeur émérite, Université Paris VIII
M. Jean-Robert Raviot, Professeur des universités, Université Paris X
M. Pierre Thorez, Professeur émérite, Université du Havre
M. Alain Blum, Professeur des universités, EHESS
Mme Cécile Vaissié, Professeur des universités, Université Rennes II
M. André Filler, Maître de Conférences, Université Paris VIII
Résumé
Depuis sa fondation officielle en 1956, la ville de Doubna s’est développée dans des conditions exceptionnelles. A l’époque soviétique, elle était l’un des principaux centres de recherche nucléaire du monde socialiste, et de nombreux étrangers y vivaient. Après 1991, cette « vitrine » d’un système désormais disparu a su négocier la transition des années 1990 en misant sur le développement des hautes technologies. Dans les années 2000, le pouvoir central s’est intéressé aux succès de cette ville dans un contexte de mise en scène du renouveau de la Russie comme grande puissance capable de surmonter les défis de la transition post-soviétique. Moscou y a financé de très importants chantiers d’aménagement afin de capitaliser le « potentiel intellectuel et scientifique » hérité de l’époque soviétique, si bien que la presse a pu qualifier Doubna de « Silicon Valley » russe. Aujourd’hui, cette petite ville transformée par les programmes fédéraux de relance est néanmoins confrontée à d’importants problèmes, comme celui de la corruption et d’une défiance grandissante de la population vis-à-vis du pouvoir.
Grâce à la méthode géopolitique ce travail se propose de questionner, à travers une étude monographique détaillée, les processus ayant conduit à la constitution d’un territoire d’exception, et de comprendre comment cette représentation méliorative est utilisée par divers acteurs dans des rivalités de pouvoir à plusieurs échelles géographiques. Plus largement, l’objet de ce travail est d’analyser les dynamiques de production et d’instrumentalisation de l’idée de « puissance » russe à travers l’étude d’une ville qui fut créée pour l’incarner dans le domaine scientifique et technologique.
Mots-clés : Russie, innovation, géopolitique, géographie, physique, technologie, aménagement, Union Soviétique, Doubna, JINR.
Abstract
Since it was officially founded in 1956 at 120 km north from Moscow, the city of Dubna’s development is exceptionnal. During the Soviet era, this city was one of the major nuclear research centers of the socialist world. After the collapse of USSR, this former « showcase » of a disappeared system managed to survive as an exception by developping high-tech industries. In the 2000s, central power became interested by this small city, as it could be useful for its strategy of putting the country back as a « major world power ». Thus, Moscow funded many important projects in Dubna, especially for capitlizing « scientifical and intellectual potential » inherited from the Soviet era. Today, this town is so transformed by this massive funding policy that it has been called « Russian Silicon Valley » for a while. But Dubna is facing many problems, like corruption or a growing disapproval of political elites by the population.
Thanks to the geopolitical approach, this work interrogates the processes that led to the creation of territory presented as exceptionnal, and how this representation of exception is used by several actors in rivalries of power at different geographical scales. In a wider perspective, the purpose of this work is to analyse production and exploitation of the official russian idea of « power » throught the case study of a city that was created to fulfill this aspiration.
Key-words : Russia, innovation, geopolitics, geography, physics, technology, urban planning, Soviet Union, Dubna, JINR.