Le conflit touareg et ses enjeux geopolitiques au Mali
– M. GREGOIRE Emmanuel, directeur de recherche à l’IRD, affecté à l’UMR PRODIG, Paris
– M. RETAILLE Denis, professeur en Géographie à l’Université de Bordeaux III, rapporteur
Autre membre du jury
– Mme GIBLIN Béatrice, professeur émérite à l’Institut français de géopolitique (Paris 8)
Directeur de thèse
– M. GASCON Alain, professeur émérite à l’Institut français de géopolitique (Paris 8)
Le conflit touareg et ses enjeux géopolitiques au Mali
Depuis 2012, le Mali est confronté à une rébellion des minorités touarègues menée par les insurgés du MNLA (mouvement national pour la libération de l’Azawad) et leurs alliées du MAA (Mouvement arabe de l’Azawad) et du HCUA (Haut conseil pour l’unicité de l’Azawad) ; tous, regoupés au sein de la CMA (Coordination des mouvements de l’Azawad). Ainsi, les parties nord du pays (Azawad : objet de revendication pour une autonomie ou pour une indépendance) ont servi de lieux d’affrontements les plus meurtriers entre l’armée malienne et les insurgés. Grâce à une coalition MNLA-AQMI (Al Qaïda au Maghreb islamique) et alliés (narcotrafiquants, An Sar Dine, etc.), ils ont défait l’armée malienne et occupé les territoires revendiqués avant d’être chassé à leur tour les terroristes. Cependant, si, les interventions française (de l’Opération Serval) et africaine depuis janvier 2012 ont mis un frein à l’offensive des terroristes et libérer les grandes villes du Nord, elles n’ont pas mis fin à la guerre qui oppose rebelles et soldats maliens qui continuent jusqu’au mois de mai 2015. Malgré les pourparlers d’Alger (entamés depuis début 2015), les insurgés qui occupent toujours la ville de Kidal, poursuivent leur revendication d’un statut juridique et politique pour l’Azawad. De manière générale, la présente rébellion est une suite logique des précédentes (des années 60, 90 et 2000). Elles émanent d’un malaise de certaines communautés arabo- touarègues manifesté par la mauvaise gouvernance et la marginalisation dont celles-ci pensent avoir subi. Ce mal être des insurgés résulte aussi de la part de l’héritage des rapports difficiles et conflictuels entre nomades et sédentaires, entre « noirs » et « blancs », entre maîtres et esclaves, entre assujettis et « seigneurs ». Aussi, la crise du Sahel a aggravé l’enclavement et l’isolement du Mali-Nord, notamment de l’Azawad, et accentué le sentiment d’être oublié. Elle a desserré et distendu les liens d’avec le reste du Mali « utile ». Toutefois, le soulèvement de 2012 n’a pas entraîné toutes les communautés de l’Azawad dont les rebelles supposent défendre ou parler en leur nom. Il intervient également dans un contexte de soulèvements populaires dans certains Etats arabo-berbères (« printemps arabe » pour les médias), notamment en Libye (guerre civile, puis, la chute de Kadafi). De nombreux combattants touaregs de l’armée libyenne ont ainsi rejoint (avec armes) les rangs du MNLA.
Mots clés : Touareg (peuple berbère); Al-Qaïda; Tilemsi; Vallée du (Mali); Mali-politique et gouvernement-1960; géopolitique-Mali.
The Tuareg conflict and its geopolitical stakes in Mali
Since 2012, Mali has been facing a rebellion of the Tuareg minority-led insurgents MNLA (National Movement for the Liberation of Azawad) and allied MAA (Arab Movement of Azawad) and HCUA (High Council for the Uniqueness of Azawad); all together within the CMA (Coordination of movements of Azawad). Thus, the northern parts of the country (Azawad claim object for autonomy or independence) have served as scene of the deadliest clashes between the Malian army and the insurgents. Through MNLA-AQIM coalition (Al Qaeda in Islamic Magrheb) and allies (drug traffickers, An Sar Dine, etc.), they defeated the Malian army and have occupied territories claimed before have being chased in turn terrorists. However, if the French and African’s intervention (Operation Serval) since January 2012 have curbed the terrorist offensive and freed the major cities of the North but, they have not ended the war between rebels and Malian soldiers continue until May 2015. Despite the Algiers talks (started since early 2015), the insurgents who still occupy the city of Kidal, continue to claim a legal and political status for Azawad. In general, this rebellion is a logical continuation of insurrections (1960, 1990 and 2000). These rebellions erupted because certain Arab and Tuareg communities feel discontented and they have suffered from poor governance and marginalization. The insurgent unrest also results from the legacy of difficult and conflicting relations between nomads and settled, between “black” and “white”, between masters and slaves, and between subjects and “lords”. Also, the Sahel crisis have aggravated the isolation of North Mali (particularly Azawad) and accentuated the feeling of being forgotten. It has stretched and distended the bonds of the rest of “useful” Mali. However, all the communities’ Azawad didn’t participate in the 2012 uprising therefore rebels cannot defend or speak for them. It also comes amid popular uprisings in some Arab-Berber States (“Arab Spring” for the media), especially in Libya (civil war, then the fall of Kadafi). Many Tuareg fighters of the Libyan army joined (with then weapons) the ranks of the MNLA.
Key words: Keywords: Tuareg (Berber people) Al-Qaeda; Tilemsi; Valley (Mali); Mali and government-policy- 1960-….; geopolitical Mali