LE DESSOUS DES CARTES, ATLAS GEOPOLITIQUE
Une coédition ARTE Éditions/Tallandier – Parution : 2 septembre 2005
L’émission LE DESSOUS DES CARTES, avec plus de 900 000 téléspectateurs chaque semaine, fête ses 15 ans sur ARTE et publie à cette occasion son premier Atlas.
Cet Atlas est novateur d’abord par sa forme visuelle : beauté des 360 cartes affichant les reliefs, toutes « racontées » par des commentaires et légendes et un texte qui permet le passage de l’une à l’autre et propose un raisonnement.
Car il s’agit bien d’un « Atlas du raisonnement ». Il souhaite aider le lecteur à réfléchir sur les situations internationales, et lui permettre de déchiffrer celles qui se présenteront plus tard à lui.
Où se trouve Diégo Garcia ? Y a-t-il des guerres justes ? Quelles frontières pour l’Europe de demain ? Peut-on prévoir la politique chinoise ? Le réchauffement climatique est-il réversible ? À quoi sert le terrorisme ?
Autant de questions cartographiées qui rappellent qu’il s’agit bien là d’un Atlas politique autant que géopolitique.
Ce premier Atlas du Dessous des Cartes poursuit l’ambition pédagogique de l’ émission, donner des outils pour apprendre et réfléchir. Avec équilibre et objectivité. Mais sans neutralité : pas question en effet d’être géopolitiquement correct à tout prix.
Note de lecture par Sonia Jedidi
Jean-Christophe Victor, Virginie Raisson et Frank Tétart, Le dessous des cartes : atlas géopolitique, coédition ARTE Éditions/Tallandier, 2005, 264 p.
A l’occasion des quinze ans de l’émission du Dessous des cartes, Jean-Christophe Victor, Virginie Raisson et Frank Tétart proposent dans un atlas géopolitique une intéressante grille de lecture du monde. Conçu sur le même principe que l’émission, cet ouvrage utilise la démarche géopolitique pour décrypter et analyser des enjeux internationaux, des situations conflictuelles et quelques tendances du monde contemporain. 360 cartes affichant les reliefs illustrent un texte qui permet le passage de l’une à l’autre mais surtout de comprendre, de réfléchir et de raisonner sur des situations géopolitiques issues d’un monde de plus en plus complexe depuis la fin de la guerre froide.
La première partie de l’atlas utilise une approche continentale à travers plusieurs itinéraires géopolitiques qui traitent de sujets très divers : « L’élargissement de l’Union européenne, un projet géographique, économique ou politique ? » ; « Brésil, nouvelle puissance du Sud » ; « Égypte, le pays aux quatre rentes » ; « Lhassa, l’identité confisquée » ; « Burkina Faso, qu’est-ce qu’un pays pauvre ? », etc… On retrouve la démarche efficace transdisciplinaire adoptée dans l’émission où la géographie et l’histoire occupent une place très importante. En effet, tout évènement est influencé par le lieu où il se déroule et par son passé, mais il faut pour pouvoir bien l’appréhender tenir compte d’autres facteurs qu’ils soient d’ordre politique, économique, social ou autre. L’accent est mis également sur une vision dynamique des cartes. Si les cartes sont réputées être muettes, cet atlas montre l’importance de la comparaison, de la superposition ou de l’analyse multi-scalaire. Le changement d’échelle montre par exemple que l’île de Diégo Garcia n’est pas un simple atoll perdu dans l’océan indien mais un élément majeur du dispositif stratégique américain.
La seconde partie propose une analyse transversale du « monde qui vient », autour du concept de la guerre et des enjeux de l’environnement, de l’économie et de la santé. Les auteurs ont choisi deux clés d’entrée pour analyser notre futur : « les logiques de guerre » et la question du développement qu’ils considèrent « peu durable ». Ce regard sur l’avenir du monde qui pourrait apparaître à première vue plutôt pessimiste, démontre le souci de souligner des risques majeurs géopolitiques, tels la question de la prolifération nucléaire ou de la sécurité alimentaire. Une intéressante typologie des conflits illustrée par quatre guerres non résolues : « Tchétchénie, pourquoi la guerre ? » ; « Colombie, une violence endémique » ; « Côte d’Ivoire, vers l’instabilité ? » ; « Afghanistan, retour vers la paix ? » et une réflexion sur le terrorisme sont présentées. Il faut souligner par ailleurs la pertinence de la démarche utilisée pour traiter de sujets, tels que les barrages turcs ou le Golfe de Guinée ; celle-ci rend compte de l’importance des rivalités de pouvoir et/ou du poids des intérêts contradictoires.
Cet atlas ne se veut pas exhaustif mais a été construit à partir d’une sélection des sujets traités lors des émissions télévisées. Il présente l’avantage de répondre aux interrogations que se pose le grand public sur des questions importantes mais peu connues. Bien que le format et les couleurs chatoyantes de ces cartes soient très agréables à regarder, on peut toutefois regretter que les légendes, sans doute exposées oralement lors d’émissions, soient parfois incomplètes. En revanche, une intéressante bibliographie et un fort utile index sont présentés en fin d’ouvrage. On retrouve également un souci de clarté et de concision, et les mêmes qualités pédagogiques du programme télévisé dont l’exceptionnelle longévité est remarquable. En effet, depuis 15 ans, le Dessous des Cartes en n’utilisant que des cartes pour visuel, a réussi le pari d’expliquer en 11 minutes à plus de 900 000 spectateurs des situations géopolitiques très compliquées. Dans un monde télévisé qui s’oriente de plus en plus vers des émissions de télé réalité, il faut louer l’utilité sociale et la démarche citoyenne de ce type de programme.