William Bunge, le géographe révolutionnaire de Detroit par Allan Popelard
Cet article complète l’enquête d’Allan Popelard et Paul Vannier, « Detroit, la ville afro-américaine qui rétrécit », publiée dans Le Monde diplomatique de janvier 2010 (en kiosques).
Qui connaît William Bunge ? Bien rares sont ceux qui, en France, ont eu vent de ce géographe américain dont les travaux, aux Etats-Unis, marquèrent la discipline géographique de leur empreinte. Son œuvre, d’une grande richesse et d’une grande originalité, mérite pourtant l’attention [1].
Après la publication en 1962 de son livre Theoretical Geography, Bunge devient l’une des figures internationalement reconnue de la géographie quantitative. Cette nouvelle école, apparue en Suède et dans le monde anglo-saxon, connaît alors un grand succès en tentant, grâce au traitement informatique de séries statistiques, de décrire les lois de l’organisation de l’espace.
William Bunge se détache cependant dès la fin des années 1960 du courant qu’il a lui-même contribué à développer. L’utilisation faite par les pouvoirs publics et privés des méthodes quantitatives dans le cadre d’opérations d’aménagement urbain organisant légalement la ségrégation sociale et raciale à Detroit ou dans certains programmes fédéraux comme l’Urban Renewal attestait en effet la dimension non seulement descriptive mais aussi prescriptive de la « nouvelle géographie ». Comme le souligne le géographe américain Richard Peet, le développement de la géographie quantitative est « intimement lié à des intérêts industriels et commerciaux [2] ». Cet abandon brutal des méthodes de la géographie quantitative s’explique donc par une double prise de conscience : celle des finalités politiques de la production d’un certain savoir géographique et celle du caractère indissociable de la recherche et de son application, de la théorie et de l’action. C’est donc vers une autre géographie que William Bunge s’oriente, vers une géographie de terrain qu’il tentera de mettre au service des habitants de sa ville : Detroit.
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